Selon le dernier rapport d'exécution budgétaire, présenté demain à la commission des Finances de l'Assemblée nationale, équilibrer le budget de l'Etat en cinq ans suppose de ne pas augmenter les dépenses de plus de 30 milliards.
C'est un brevet de vertu budgétaire que délivre à la droite, au terme de cinq années de gestion de l'Etat, le rapporteur de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, Gilles Carrez. Dans le rapport sur l'exécution du budget 2006, qu'il présentera demain à la commission, il procède à un examen rétrospectif de la politique de finances publiques conduite au cours des deux dernières législatures. Il en tire comme enseignement que « les finances de l'Etat n'ont pas été structurellement dégradées entre 2002 et 2007, ce qui constitue, en soi, une très profonde rupture avec le passé ».
Emanant d'un député UMP à un mois de la présidentielle, cette conclusion pourrait faire sourire. Ce serait oublier que le rapporteur du budget a rarement ménagé ses critiques à l'encontre de l'actuelle majorité, par exemple lorsque les comptes de l'Etat s'étaient fortement dégradés, en 2003, ou encore à l'occasion de la loi de Finances 2006 qu'il ne jugeait pas assez rigoureuse. Gilles Carrez profite, d'ailleurs, de ce dernier rapport pour dessiner une critique implicite aux candidats dont il juge les coûteux programmes incompatibles avec l'objectif de « déficit zéro ». Un message qui s'adresse à Nicolas Sarkozy autant qu'aux autres... Car Gilles Carrez calcule que, si elle veut parvenir en cinq ans à l'équilibre budgétaire, la prochaine majorité ne devra pas augmenter de plus de 30 milliards d'euros en cinq ans les dépenses de l'Etat (266 milliards d'euros fin 2006). En effet, l'analyse des plus-values et moins-values fiscales sur moyenne période montre que, pour être assuré de ne pas creuser le déficit, le gouvernement ne doit jamais distribuer, en dépenses supplémentaires, baisses d'impôts et allégements de charges, plus de 12 milliards d'euros par an. Résorber en cinq ans un déficit d'aujourd'hui de 36 milliards d'euros suppose d'y consacrer 6 milliards d'euros par an, ce qui ne laisse que 6 milliards d'euros de marge de manoeuvre annuelle pour les dépenses supplémentaires. L'effort à accomplir est deux fois plus important que celui réalisé au cours de cette législature. Car, selon les chiffres de ce rapport, l'actuelle majorité aura distribué, entre 2002 et 2007 (loi de Finances incluse), 60,2 milliards d'euros supplémentaires, dont 20,7 milliards d'euros en baisses d'impôts. C'est 41,5 % de moins que sous la précédente majorité (85,2 milliards d'euros).
Paradoxe
Au passage, la comparaison des résultats budgétaires des deux législatures montre que la droite a sensiblement moins baissé les impôts que la gauche (35,1 milliards d'euros)... Un paradoxe pour une majorité élue sur un programme de forte baisse de l'impôt sur le revenu. Il s'explique, en bonne partie, par la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle et de la part régionale de la taxe d'habitation, à mettre au crédit du gouvernement de Lionel Jospin. Cependant, au regard de la gestion des finances publiques, les dépenses et baisses d'impôts de la gauche ont dégradé le déficit de 6,8 milliards d'euros entre 1997 et 2002. A contrario, souligne le rapport Carrez, les surplus de dépenses et allégements fiscaux occasionnés par la droite, parce qu'ils ont été surfinancés par des recettes, ont permis d'améliorer le solde de 7,6 milliards d'euros entre 2002 et 2007. Au total, en prenant pour point de départ le déficit budgétaire de 2002, évalué avant toute intervention de la majorité élue en juin, à 46,4 milliards d'euros, la situation des finances de l'Etat s'est rétablie à hauteur de 10 milliards d'euros au cours de cette législature.
Jeudi soir, sur France 2, la candidate socialiste à la présidentielle, Ségolène Royal, a expliqué qu'elle entendait d'abord faire décélérer le rythme d'augmentation du déficit budgétaire, avant de le stabiliser, puis de le réduire. Le travail est déjà fait.