Par Philippe Bilger sur Agoravox
L’actualité est inventive qui, du tragique au dérisoire, nous oblige à jouer de toute la palette de notre esprit et de notre sensibilité. De l’indignation au grotesque, du futile au sérieux. La société est à pleurer ou grimace son rire.
On vient d’apprendre - et Le Parisien y consacre une pleine page - que Didier Morville, plus connu sous l’identité de Joey Starr, a usurpé, en 2001-2002, celle d’un ouvrier de trente-quatre ans malencontreusement prénommé Didier et nommé Morville. Celui-ci s’est vu imputer, à son grand désarroi, un certain nombre d’infractions routières, dont certaines graves si l’on en croit son avocat.
Joey Starr a, au cours de sa carrière, été impliqué dans un certain nombre d’incidents. Il a fait l’objet de procédures, notamment pour deux affaires de violences. Il a déjà été condamné à plusieurs reprises.
Certes, c’est le passé, et l’honnête Didier Morville a subi les agissements de "l’artiste", il y a quatre ou cinq ans, le Trésor public ayant rajouté sa contrainte en 2003, avant que, beaucoup plus tard, la vérité ne se fasse jour. Certes, Joey Starr, mis en examen, est défendu par un très grand avocat, de surcroît mon meilleur ami, Me Jean-Yves Le Borgne. Mais tout de même !
Je me souviens des dithyrambes ayant accueilli le mois dernier le nouveau CD du chanteur. Dans leurs pages culturelles, Le Monde, Libération et d’autres publications avaient fait fort dans l’idolâtrie. Si cette dernière ne s’était rapportée qu’au créateur, pourquoi pas ? A chacun ses goûts et ses dégoûts. Mais à cette occasion, on a prétendu le représenter en héros des banlieues, héraut d’un civisme rajeuni et penseur traité avec infiniment de respect, comme si de sa bouche, lors des entretiens, n’était sorti que le miel de la finesse et de l’élégance, avec quelques "enculés" en prime. Il a même été baptisé, sans rire, " conscience civique", et cité en exemple à tous ceux de sa génération qui pouvaient douter de la politique et avaient oublié qu’il fallait insulter Nicolas Sarkozy. Lire la suite